En octobre 1994, trois étudiants en cinéma partent enquêter à Burkittesville à propos d'une mystérieuse sorcière. Ils disparaissent. On retrouve leur cassette vidéo un an plus tard: c'est ce film qu'on nous propose de voir ici...
Le projet Blair Witch a été mis en place par des étudiants en cinéma selon des techniques de réalisation très originales, particulièrement pour un film d'horreur: il s'agit en fait d'un faux documentaire. Réalisé avec un budget dérisoire, filmé essentiellement en vidéo numérique (matériel fiable, léger et assez peu coûteux), il fût présenté au Festival du cinéma indépendant de Sundance où il reçut un excellent accueil. S'ensuivit un bouche-à-oreille très favorable, ainsi qu'une promotion astucieuse via Internet, ce qui était alors une grande nouveauté. Les réalisateurs jouèrent sur l'ambiguïté de ce pseudo-document en laissant entendre que ce film était un enregistrement de faits réels: cela n'était cependant pas une nouveauté, puisque le très gore Cannibal holocaust (1979) de Ruggero Deodato (Le dernier monde cannibale (1978)...) avait été lui aussi promu en cultivant le doute quand à sa nature de "snuff movie". De même, un autre faux documentaire d'horreur appelé The last broadcost (1998) de Stefan Avalos et Lance Weiler a été réalisé un peu avant... Toujours est-il que Le projet Blair Witch (1999) connut une intelligente et courageuse sortie en salles: il devint alors LE succès de l'année en matière d'épouvante à travers le monde, aux côtés de Sixième sens (1999) de M. Night Shyamalan.
Le projet Blair Witch commence par la présentation de l'équipe qui va réaliser le reportage, puis nous amène à Burkittesville, où des habitants rapportent des légendes sur la sorcière supposée hanter la région et à propos d'un serial killer ayant vécu dans la ville. De manière apparemment anodine et amusante, les réalisateurs nous communiquent les bases de la mythologie "Blair Witch". On est ainsi préparé à suivre l'expédition forestière terrifiante de ces reporters de l'épouvante. Pour faire peur, il est essentiellement fait appel à la suggestion de l'horreur si chère à Jacques Tourneur (La féline (1942)...): plutôt que de provoquer l'effroi avec des scènes sanglantes et démonstratives, on cherche à inquiéter le spectateur à l'aide d'effets très fins (des bruits à peine perceptibles, une atmosphère légèrement changée...) qui vont faire travailler son imagination et le placer face à ses craintes intimes les plus profondes. Paradoxalement, ce qui fait le plus peur serait donc ce qu'on ne voit pas. Bien utilisé, ce procédé assure une efficacité maximale (La maison du diable (1963) de Robert Wise, La féline...). Ainsi certaines séquences parviennent ici à être tout à fait inquiétantes: la fin dans la maison abandonnée, les hurlements de Josh...
Toutefois, il est permis de regretter que les moments authentiquement effrayants soient bien rares. Le projet Blair Witch joue un peu trop souvent la carte de l'horreur minimaliste et n'est pas toujours convaincant. On peut avoir du mal à ressentir la peur panique qui s'empare des jeunes gens à chaque fois qu'ils entendent un craquement de brindille ou qu'ils découvrent un petit tas de cailloux. De même, les fameuses petites branches assemblées de manière à former un personnage ne créent pas forcément un grand sentiment d'angoisse. En fait Le projet Blair Witch ne parvient à devenir vraiment un film d'horreur qu'à partir d'une cinquantaine de minutes. Auparavant, il faut subir de longues disputes peu intéressantes entre des personnages interprétés avec beaucoup de conviction, mais aussi beaucoup d'amateurisme et de naïveté: un spectateur un peu mal embouché pourrait bien trouver ces jeunes comédiens complètement antipathiques.
Si Le projet Blair Witch n'est pas le chef d'œuvre de l'épouvante que certains ont bien voulu y voir, l'originalité de son principe et de son atmosphère, ainsi que quelques moments vraiment réussis, en font une œuvre qui vaut tout de même le coup d'œil.